Expo photo la chambre intime à Lyon le 7 mars
La chambre intime est un projet photographique de Hong Yi, photographe installé en France. Il nous livre à travers ses photos un regard sincère sur de jeunes femmes chinoises installées en France, photographiées dans leur intimité.
Nihao Lyon aura le privilège de recevoir Hong yi le 7 mars lors de la journée franco-chinoise organisée par l’association dans le café l’autre côté du pont. Il sera là pour présenter son travail et discuter avec vous. Alors pour faire un peu connaissance avant : interview !
Bonjour Hongyi. vous êtes actuellement en résidence à l’école nationale de photographie à Arles, qu’est ce que cela signifie exactement ?
Bonjour Julie. En tant qu’étudiant étranger, je fais partie d’un programme d’échange qui offre à des artistes étrangers, ou des étudiants étrangers en photographie, la possibilité d’intégrer un espace de recherche au sein de l’école. Pendant 3 ans, sous la direction d’un directeur de recherche, nous déterminons une thématique de recherche, nous fixons des directions à notre travail personnel. Une fois la thématique définie, notre parcours est semblable à celui de tout étudiant chercheur.
Quel vent vous a poussé en France ?
J’ai commencé à étudier et à pratiquer la photographie en Chine. Peu à peu j’ai eu le sentiment que ma pratique devenait trop systématique, qu’elle manquait de nouveauté, d’impulsion. Mes objectifs en venant en France étaient d’approfondir mes études en photographie et de continuer mon parcours de recherche. La France n’est-elle celle qui a donné naissance à la photographie ?
Pourriez vous nous présenter votre projet « La chambre intime » ?
Pour résumer, l’idée est de révéler les traces de ma propre intimité à travers le portrait d’autrui dans un espace intime.
Dans la chambre intime vous photographiez des femmes chinoises installées en France. Elles se livrent dans leur intimité, dans leurs gestes quotidiens mais aussi dans leurs émotions. Comment avez-vous fait leur connaissance ? Quelle est la relation qui vous unit à elles ? En fait, comment avez-vous fait pour qu’elles se livrent à vous ainsi ?
Les personnes photographiées sont toutes mes amies. J’en connaissais certaines depuis la Chine, d’autres je les ai rencontrées en France, pour d’autres, il s’agit d’amies d’amis ou bien encore j’ai fait leur connaissance à travers les réseaux sociaux ou à l’occasion de vernissages liés à la photographie. Elles sont installées aux 4 coins de la France. Je leur ai présenté ma thématique de travail, elles étaient d’accord pour m’héberger et j’ai commencé les prises de vue chez elles. La clé ici c’est la confiance et la compréhension. J’ai eu de nombreux échanges avec elles pendant mon travail, nous n’avons eu de cesse de dialoguer de sorte à faire disparaître la barrière liée à nos différences de sexes. La vie hors de mon pays a fait naitre en moi un sentiment contradictoire. D’une part un violent sentiment de solitude et une soif de communiquer et d’échanger avec les autres, d’autre part un espace beaucoup plus vaste laissé à la créativité grâce à une certaine liberté, un affranchissement. Je pense que ces émotions m’ont mis en phase avec les émotions de mes partenaires photographiques. Pour elles aussi c’était une manière de communiquer et d’échanger. Autrement dit à travers le regard du photographe il y a aussi une possibilité de faire connaissance avec une part inconnue de soi-même.
Les photos ont été prises en France n’est-ce-pas ? Ces femmes vivent en France et expérimentent la vie loin de leur pays. Pensez-vous que ce projet « la chambre intime » serait possible à réaliser en Chine ? En quoi l’expérience de vie en France de ces femmes rend possible une telle livraison de leur intimité ?
Oui, en effet les prises de vues ont été réalisées en France. Je pense que j’aurai pu mener ce projet en Chine, ou peut-être pas. Je ne l’ai pas tenté. Ce projet est parti d’émotions personnelles, j’ai été touché. C’est précisément chez les personnes qui vivent loin de leur pays que l’expérience de la solitude est la plus extrême.
Sur vos photos à côtés des jeunes femmes, on voit souvent leur téléphone portable, très proche d’elles. Près de leurs lits, dans leurs mains, une sorte d’ami très intime, non ?
Le portable c’est le lien avec l’extérieur, avec les amis. A plusieurs niveaux, le portable donne un sentiment de sécurité, on se sent accompagné. C’est sûr que cela rend dépendant, ça prend du temps et de l’énergie. On en vient à oublier les amis immédiatement proches de soi et à perdre le désir de communication en face à face. Peut-être même qu’au fond, on considère que le portable est le seul à vraiment comprendre sa propre existence.
Vous avez choisi de photographier des femmes. Pourquoi pas des hommes ?
En effet ! C’est certainement parce que je sens plus de résonances avec la figure féminine.
Vous avez choisi de photographier des chinoises. Pourquoi pas des françaises ?
J’essaie justement de photographier des femmes françaises, ou d’autres nationalités, pas uniquement des chinoises. Mais dans le projet la chambre intime, ce qui m’intéresse précisément c’est de saisir un état qui résulte du choc culturel. Dans ce monde individualisé, la communication et la solitude constituent une expérience complexe. Sur ce point précis, je me sens beaucoup plus proche des femmes chinoises installées ici en France que des femmes françaises. Nous avons pu trouver beaucoup de sujets communs d’échange à ce niveau.
Que pouvez-vous nous dire sur le choix du format (carré) et du traitement (N&B) des photographies de la série la chambre intime ?
J’aime le format carré qui me donne un espace confortable et stable. Le noir et blanc permet de se débarrasser des couleurs aveuglantes. Cela rend les lumières et les ombres plus franches et plus précises. Dans cette série, je voulais absolument supprimer toutes les interférences pour me concentrer sur les émotions de la vie et les capturer.
Hongyi, avez-vous d’autres projets en cours ou à venir ? Où envisagez-vous de travailler plus tard ? Est-ce que la France est une escale ou bien souhaitez vous y établir résidence ?
Oui, je tourne un documentaire sur la recherche de l’identité. Je suis issu d’une famille chinoise musulmane, le multiculturalisme en France et les débats que cela génère m’ont donné envie d’approfondir ma réflexion sur mon propre contexte culturel. A côté de cela, il y a aussi la question du développement de la Chine. En ce qui concerne mes projets d’avenir, je n’ai pas envie de me fixer de limites ou de restrictions, je laisse le vent me porter là où bon lui semblera.
Une posture très chinoise en somme !
Un grand merci pour la qualité de votre travail et pour vos propos et au plaisir de vous rencontrer le 7 mars !
Merci pour votre soutien, je n’ai rien à ajouter sinon que je souhaite le meilleur à tous !
Exposition La chambre intime organisée par Nihao Lyon
Vernissage le 7 mars 2015 à 18h
De l’autre côté du pont
25 cours gambetta
69007 Lyon